Vous raconter mon histoire ? Euh… c’est que… il y a beaucoup de chose à dire… et… elle n’est pas des plus agréables… autant à raconter qu’à entendre.

Ne t’inquiète pas, toutes les histoires ont leur intérêt

Et nous on adore les histoires, quelles qu’elles soient.

Euh… bon très bien… et bien euh… où commencer…

J’hésite un instant, mélange nerveusement mes doigts, puis soupir avant de me lancer.

Je viens d’un monde que je n’ai pas revu depuis 8 ans… toutes mes origines et mes racines s’y trouvent encore : mes terres natales, ma famille, mes amis,… C’est un monde peuplé de shinobis réunis principalement en cinq villages : les principales nations. J’habitais l’une d’elle avec mon père, ma mère, ma tante et mon… euh… mon frère…

Un silence s’installe. Kyo… pourquoi as-t-il fallu que tu…

Il y a un problème ?

Je reprends mes esprits, fais un peu la navette entre mes interlocuteurs.

Hein ? Euh… non excusez-moi une simple pensée… euh… où j’en étais… ah oui… et bien, dans notre famille nous étions tous shinobis, et nous accomplissions des missions pour le chef du village. Il faut savoir aussi que notre clan, les Oshigato, étions en très mauvais termes avec le clan Fukushi. Il y a longtemps, nous n’étions qu’un seul et même clan, mais lors de la première élection de chef, l’élu n’a pas du tout fait l’unanimité.

Comment ça se fait ? Il a été élu, donc une majorité a voté pour lui non ?

En théorie oui, mais certains opposants ont prétexté de la triche, soit en achetant les voix, soit par menace… Du coup, ils ne considéraient pas l’élu comme légitime. Il a pourtant essayé de se défendre, soutenu par ses partisans, et d’après ce que j’ai pu lire dans les parchemins d’histoire, il était tout à fait honnête… mais rien n’y a fait, et n’arrivant pas à se mettre d’accord, les deux camps se sont séparés. Les partisans ont choisi le nom d’Oshigato, et les autres, celui de Fukushi. Depuis, les Oshigato ont développé une spécialité : avoir un lynx comme invocation.

Tu… tu peux invoquer un lynx ?

Oui… le mien s’appelle Saïkosaï.

Et les fukushi, ils avaient quoi ?

Et bien…. Concernant les invocations, ils n’avaient rien… et c’est bien là le problème. En fait, voyant que notre clan évoluait, ils se sont enfoncés dans leur jalousie, et n’ont pas arrêté de comploter pour renverser notre clan. Pourtant, ils avaient aussi leur atoût, et pas des moindres, mais il faut bien avouer que pour combattre comme il le voulait, c’était moins pratique que les invocations…

Mais vu que tu portes toujours ce nom, je suppose qu’ils n’ont jamais réussi à vous renverser, je me trompe ?

Jusqu’à mes 16 ans non… mais ils n’ont pas été loin. Un jour, ma famille a été envoyée sauf ma mère, pour une mission tout autre aux abords du village. Un groupe de quatre bandits semait la terreur dans une localité voisine, et nous devions régler le problème. Sauf qu’au cours de la mission, nous nous sommes rendus compte que ces personnes n’étaient autres que le clan Fukushi lui-même pour nous attirer et enfin extirper notre atoût. Ils ont utilisé la métamorphose pour être totalement méconnaissables, et personne ne s’est douté de quelque chose… Ce n’est que quand je me suis retrouvée piégée dans un genjutsu que j’ai compris.

Un genjutsu ?

Ah oui pardon… euh… en fait c’est une capacité qu’ont certains shinobis, qui te plonge dans une sorte d’illusion. Il contrôle tout ce qu’il s’y passe. Là, elle m’avait retenue avec des lianes blanches lors d’une petite faute d’inattention de ma part.

Et elle voulait te tuer ?

Pas directement. En fait, il faut savoir que le parchemin qui a été servi pour le pacte d’invocation a été scellé en nous, justement pour qu’il soit plus difficile à subtiliser. Moi, j’ai la marque dans le dos. Et ce que voulait ce membre de Fukushi, du nom de Aïko, c’était me l’arracher pour se l’approprier en modifiant le pacte sur le papier. Ainsi répété sur plusieurs membres d’Oshigato, ils pouvaient retourner notre atout contre nous.

Ils pouvaient faire ça ?

Oui, leur atoût a eux, c’était le fuinjutsu, autrement l’art de manipuler les sceaux. Et en arrachant le sceaux à quelqu’un, on lui ôte la vie.

Excuse-moi, mais c’était pas une erreur de stratégie de sceller ainsi le parchemin alors qu’ils maîtrisaient l’art des sceaux ?

Quand la mesure a été prise, leur capacité n’atteignaient de loin le niveau de ce jour-là. Et puis, nous n’avions pas de meilleures solutions. Les anciens ont imaginé qu’ainsi toujours sur nous, ce pacte était plus facile à protéger que s’il était entreposé à une place.

Mmh oui ça se tient… difficile à contrer ce genre de technique…

Oui… beaucoup de nos dirigeants ont planché sur le sujet… heureusement ce jour-là, j’ai pu m’en sortir grâce à ma tante qui est venue me sauver in extremis. Pour me libérer de l’illusion, elle n’a eu qu’à repérer Aïko et la frapper pour la déconcentrer. Seulement, elle m’a appris que mon frère était en très mauvais état. Et vu que je maîtrisais l’art de la médecine principalement, elle m’a envoyé l’aider pendant qu’elle s’occupait de la femme ennemie ce que j’ai fait aussitôt… mais…

Je sens mon cœur se pincer, et les larmes presser contre mes yeux. Je dois m’arrêter quelques secondes. Je baisse les yeux pour ne pas céder aux pleurs, respire profondément plusieurs fois, puis relève le regard. J’aperçois leur regard assistant, que je fuis immédiatement.

Mais il était trop tard…

Trop tard ? Ils ont pu lui extirper le parchemin ?

Non… mais sa vie lui a tout de même été ôtée dans la manœuvre… mon père est arrivé trop tard, et il a juste pu les empêcher de terminer leur extraction.

Mais c’est horrible !

Le plus horrible, c’est de constater son décès en tant que médecin… je m’en voudrais toute ma vie…

Pourquoi ? Tu n’y peux rien…

Si… j’étais la soigneuse du groupe… j’aurais dû être à ses côtés… si je n’avais pas été prise dans le genjutsu d’Aiko j’aurais pu me rendre sur place bien plus vite… il est mort parce-que je n’ai pas été assez rapide…

L’un de mes interlocuteurs se lève et me pose une main sur l’épaule.

Je comprends ta souffrance, mais tout semblait orchestré pour vous piéger… je suis sûre que tu as fait de ton mieux, garde toujours ça en tête…

Je lui accorde un petit sourire, bien que peu sincère…

Peut-être…

Il va se rasseoir.

Et comment ça s’est terminé ?

Et bien… la femme que je combattais a été vaincue par ma tante, et le reste par mon père. Nous avions réussi notre mission, mais la victoire avait un goût amer. Devant la tombe de mon frère, je tenais fermement ma croix chrétienne devant moi, entre mes doigts, priant pour que Kyô trouve le repos éternel qu’il mérite… j’ai été bouleversée les quelques jours suivants… jusqu’au jour où, me morfondant dans mon lit, ma vie a changé du tout au tout.

Tu es venu dans notre monde ?

Oh non… cette histoire date d’il y a 8 ans… entre temps, j’ai été aspirée dans un monde bien plus cruel que le premier. Il s’appelle Kosaten… enfin s’appelait, car il a subit une apocalypse, qui m’a propulsée ici.

Et comment il était ce monde ?

Il se composait de trois nations principales, qui comme à pas mal de place, se faisaient la guerre. Alors les dieux de chaque nation ont invoqué des combattants de partout pour renforcer leur rang et les obliger à combattre.

Et toi ? Tu voulais te battre ?

Non… de loin pas… je déteste la violence… je n’ai fait que shinobi pour pouvoir protéger ceux que j’aime et qui sont innocents. Avec Kyo j’ai échoué d’ailleurs… heureusement j’ai pu à contrario soigner pas mal de monde depuis… ça me permet de persévérer dans cette voie de soin.  

Mais je ne comprends pas… si tu ne voulais pas te battre, tu n’avais qu’à rester en retrait ou te mutiner non ?

Je fis une petite moue.

Ce n’était pas aussi simple, tu t’en doutes. En nous invoquant dans ce monde, le dieu de la nation qui m’avait appelée m’avait marquée d’un sceau représentant le blason patriotique. Ce sceaux, au-delà de réduire mes déjà maigres forces à celles d’un civil tout à fait banal, nous infligeait une douleur innommable dès qu’on s’écartait de sa volonté de servitude.  

Mais pourquoi réduire la force s’il voulait vous utiliser pour combattre ?

Pour éviter la rébellion. Imagine-toi forcé de combattre pour un tout autre univers, les moins faibles ne se laisserait pas faire. Il aurait envie de se retourner contre sa nation malgré la douleur du sceau.  Et vu la puissance que certains ont pu retrouver au fil des années ou même des mois, quand le sceau s’affaiblissait, les laisser dès le départ à pleine possession de leur force était se tirer un shuriken dans le pied. Avec le temps, les dieux avaient une chance que la rancœur s’affaiblisse. En effet, certains ont accepté leur sort et se sont même petit à petit battu de leur plein gré pour leur nation… Le lavage de cerveau avait marché… d’autres ont résisté au charme… ça a crée beaucoup de conflit.

Et toi ? Qu’as-tu fait ?

Je soupire.

Tu sais… je suis quelqu’un qui ne sais pas m’imposer. Et la nation dans laquelle j’ai été était vraiment cruelle. Elle s’appelait Fuyu et ne vivait que par son désir de conquête et de puissance…  et je ne vous parle même pas de son dirigeant… Du coup, je ne me suis pas du tout rebellée au début, j’avais trop peur… autant du chef que du sceau… mais j’essayais en douce d’aider les combattants des autres nations, encore désorientés, à ne pas se faire tuer par ma nation qui rejetait tout étranger au sein de ses terres.

Tu ne craignais pas de te faire attraper ?

Si… énormément… mais je voulais tellement ignorer cette histoire de nation ennemie et considérer chaque être comment étant unique… parce-que ceux invoqués n’avait comme moi pas choisis d’être là-bas, et j’espérais que peut-être ils pensaient comme moi… d’ailleurs au-delà du sceaux qui me rappelait sans cesse qu’il était inutile de lui résister, cette façon de vivre a commencé à peser sur ma vie…

Tu t’es fait attraper ?

Non… mais dans ma naïveté, j’ai commencé à ne plus cacher mon sceau aux autres personnes que je croisais, ayant l’idée que par ce biais, je prouvais mon honnêteté et ma bonne foi… sauf que Fuyu était très haïe partout, encore plus que les autres. Et ça m’a coûté très cher…

Un nouveau silence s’installe. On entre dans la partie la plus douloureuse de ma vie… cette rencontre avec Néo… ce dénouement que personne n’attends… et qui marque à vie…

Tu as été agressée à cause de ça ?

Pire…

Je baisse les yeux à un endroit précis de mon corps… sans mot, juste avec mon expression et l’orientation de mes yeux, ils comprennent ce qu’il s’est passé… je n’ai pas besoin d’expliquer davantage, je n’avais pas envie… quelle humiliation c’était… leur visage déconfit est leur seul réaction pendant un bref instant.

C’est une blague !! Et qu’est-ce que tu as fait pour le punir ? Tu l’as retrouvé ??

Je… je n’ai rien fait… je vous l’ai dit, je ne suis pas une battante… la plupart du temps je subis… et ce fut le cas ce jour-là…

Et tu l’as laissé s’en tirer ??

Hey calme-toi, elle a dû beaucoup souffrir…

J’avais que 17 ans à l’époque, j’étais encore plus chétive que maintenant…. et je n’avais aucune envie de le revoir…. Comprends-moi… et puis même si j’avais voulu le retrouver, le temps que je me remette de mes émotions et que je sois en état de faire quoi que ce soit, il était déjà bien loin. Il faut bien imaginé que ce ne s’est pas arrêté à un viol… on s’est battu avant…

dix… dix sept ans… oh putain quelle raclure…

Et qu’est-ce que s’est passé après ? Tu es restée toute seule ?

J’étais effondrée, très faible et très traumatisée mentalement… encore maintenant parfois, ça vient me hanter dans mes rêves… mais heureusement un total inconnu m’a pris dans ses bras et m’a portée en volant jusqu’au village le plus proche. J'ai pu m’y reposer et reprendre mes esprits avant de retourner à Fuyu… Paradoxalement, je me sentais plus en sécurité là-bas, que hors de la nation, là où on haïssait mon sceau…

Ouais, tu pouvais rien faire à part rester chez des brutes… comment t’as fait pendant 8 ans pour ne pas tourner fou ?

J’émis un petit rictus. En fait, je l’étais devenue, sauf que ça ne se voyait pas… du moins pas physiquement. Mais étaient-ils prêts à l’entendre ?

C’est une bonne question. Mon mental a été mis à rude épreuve. Mais au bout de plus d’une année, j’ai fait la rencontre de quelqu’un qui avait aussi été invoqué à Fuyu, et qui m’a beaucoup aidée.

J’émis un silence en repensant à ce membre de l’akatsuki… il était si ambiguë et pourtant si salvateur… un être mystérieux au plus haut point, mais qui m’avait montré plusieurs fois sa bonne volonté envers moi… encore aujourd’hui je me demande si c’est sincère, mais je ne creuse pas plus, car il était le seul à m’avoir aidé si longtemps.

Il avait plusieurs noms à travers le pays, pour ne pas se faire repérer, mais moi je connaissais son véritable prénom… Nagato… car il venait du même monde que moi.

Sérieux ? Vous deviez bien vous entendre alors…

Et bien… au début non… car en réalité dans notre monde, nous étions ennemies. Il faisait partie d’une organisation détestable qui était composée de déserteurs et qui avait pour but d’accumuler assez de puissance pour renverser le monde tel qu’on le connaissait…

Et tu lui as accordé ta confiance dans ce nouveau monde ?

Oui… parce-que contrairement à ce qu’on pourrait croire, il a été très respectueux avec moi. Il m’a protégée plus d’une fois et m’encourageait à ne plus subir ma vie et à me battre bien plus pour mes convictions… bon c’était à sa manière, et je me sentais souvent très mal à l’aise à ses côtés, mais il dégageait aussi une telle confiance en lui et une telle patience envers moi, que petit à petit, j’en venais presque à oublier son passé…

Et t’es sûr que c’était pas une simple manipulation de sa part ? Parce-qu’on parle quand même d’un mec qui voulait renverser ton monde d’origine…

Je ne suis sûre de rien…peut-être que tout cela n’était pas sincère… je me suis d’ailleurs souvent poser cette question, mais à chaque fois que je me l’a posais… peu importe l’avis que je concluais… j’avais toujours cette affirmation qui trottait dans mon esprit : j’avais besoin de lui… parce-que… en fait… mon agression n’est pas restée sans séquelle…

Comment ça ? Ne me dis pas que….

Si… je l’ai découvert 1 mois et demi après… j’étais enceinte…

Un éclair semble zébrer le paysage, et les visages de mes auditeurs se figent dans l’étonnement. Aucun mot ne sort. Je pose une main un peu nostalgique sur mon ventre…

Rumaki… tu… tu es allée au terme ? tente enfin l’un d’eux.

Je le regarde et après un instant de blanc, je réponds.

Oui… je ne pouvais me résoudre à tuer cette vie à venir, peu importe ses origines…

Ça ne devait pas être facile à porter…

Non… déjà pour les problèmes usuels qu’a une femme pendant la grossesse… mais aussi pour le contexte dans lequel j’étais… pendant les neufs moi qui ont suivi, beaucoup de choses se sont passées. Et la plus terrible ça a été les catastrophes naturelles qui se sont déroulées un peu partout dans Kosaten. En ce qui me concerne, mon village a été victime d’une inondation. Etant une shinobis d’origine, j’ai spontanément mis de côté le fait d’être limitée par le bébé, pour tenter de sauver le plus de monde. Mais ça m’a été reproché.

Ah bon ? Par qui ?

Nagato… en réalité, j’ai pris pas mal de risques  pour sauver des vies, en étant enceinte, et pour lui, c’était sacrifier deux vies dont la valeur était inestimable… surtout celle que je portais…

Donc pour lui, toutes les vies n’avaient pas la même valeur ? Je ne voudrais pas te dénigrer, mais c’est un peu bizarre comme raisonnement… il t’aimait particulièrement ?

Non… enfin… on ne s’était vu qu’une fois, je ne pense pas qu’il tenait particulièrement à moi. Par contre, il m’avait expliqué après coup que cet enfant était important, car il provenait de deux êtres qui venaient d’autres mondes, et d’après lui c’était la première fois à Kosaten.

Ouais… encore son propre intérêt quoi…

Peut-être… d’ailleurs, je me suis souvent dit qu’il m’avait sauvée juste pour le bébé. Mais quand j’y repense, lui aussi a pris de très gros risque pour m’aider alors que rien ne l’obligeait. S’il avait voulu me sauver seule, il aurait simplement pu me forcer à quitter les lieux, en m’emportant par exemple. Alors que là, il a lutté contre les intempéries en utilisant son énergie jusqu’au sang et même quand j’ai voulu le soigner, il a catégoriquement refusé, de peur que je ne me fatigue trop… ça doit être plus compliqué qu’un simple intérêt personnel…

Il est étrange… difficile de lire dans ses intentions…

Oui… même moi qui l’ai souvent revu jusqu’à aujourd’hui, je ne sais pas encore où s’arrêtait son honnêteté, mais je suis convaincue qu’une part de sincérité se cachait dans ses actions et ses paroles.

Hey mais à cause de cette catastrophe, tu t’es retrouvée sans maison ? T’as fait comment ? T’es allée chez lui ?

Non… je suis allée dans la capitale, où les autorités nous ont aidés comme ils pouvaient à nous reloger. Personnellement, j’ai été accueillie par une très charmante dame, qui avait déjà un certaines âge, et qui avait le doux nom de Mei. On s’est tout de suite très bien entendue, elle est même devenue ma confidente. Je pouvais tout lui dire, tout lui raconter, jamais elle ne me jugeait, elle me soutenait même toujours.

Ah enfin quelqu’un de pas ambigüe et qui te veut du bien !

J’émis un petit rire.

On peut voir ça comme ça oui. En tout cas elle, je savais très bien qu’elle ne me ferait aucun coup bas. Rien que les premiers jours de ma vie chez elle, j’ai pu tout lui dire ce qui m’était arrivée à Kosaten, et elle a su trouver les mots pour partager ma peine et me soulager un peu. C’était vraiment une perle rare. Grâce à elle, les derniers mois de ma grossesse ont été beaucoup plus faciles à vivre.

Et du coup, le petit est arrivée dans de bonnes conditions, tout est bien qui finit bien se rassure l’un de mes auditeurs.

Euh… pour être honnête non…

Une petite vague de déception traverse la foule, et je m’explique.

En réalité, j’ai accouché dans le froid mordant de Fuyu, qui a comme climat des neiges éternelles.

Sérieux ?? T’as été surprise par le déclenchement ?

Oui… j’avais pris pour habitude de me rendre de temps dans un coin d’une forêt de la nation, et d’y rejoindre un petit cocon d’intimité que j’avais confectionné avec quelques visages de ma famille dessinés.

Y a plus confortable qu’une toundra pour un coin intime…

Je sais… mais je voulais être seule… et mon cœur a penché pour ce morceau de terre… je n’ai pas cherché de raison et je me suis installée là. Sauf que ce jour-là, en rentrant, j’ai soudainement eu énormément mal au ventre. Le bébé allait arriver.

Dans le froid ??

Eh oui… j’en étais arrivée à un stade où je ne pouvais plus marcher et je me suis appuyée contre un arbre, maudissant en souffrant le fait d’avoir à porter ce bébé qui m’a été imposé. Je sais c’est un peu paradoxal parce-que j’ai choisi de le garder, mais… sa conception, je ne l’avais pas choisi… enfin… je ne sais pas si vous me comprenez…

Si si… je visualise… tu t’étais attachées à ce bébé, mais les souffrances de cet épisode t’ont renvoyée à cette terrible agression… c’est ça ?

Je hoche la tête. Il avait tout compris. Combien de fois j’avais songé à tuer ce bébé… heureusement, je n’avais jamais cédé… j’en aurais été bien plus meurtrie…

Alors que je souffrais au sol, quelqu’un s’est approché et m’a délicatement soulevée pour m’amener dans une grotte… sur un sol sec…

La chance ! Il t’as aidé à accoucher ?

C’était une fille… et elle n’avait pas l’air de s’y connaître beaucoup… dans les quelques souvenirs qui me restent, elle restait à côté et m’encourageait, tout en maintenant un feu de bois. Mais c’était déjà énorme. J’ai pu alors me concentrer à appliquer toutes mes connaissances en matière de maternité sereinement.

C’est beau !

Je dessinai un petit sourire timide.

Oui… finalement j’en garde plutôt des bons souvenirs… surtout que Mei nous a rejointes par inquiétude, et c’était une joie immense de lui présenter le nouveau-né… du nom d’Haïko.

Ah…euh… comme la fille de Fukushi ?? c’était voulu ?

Pas vraiment, je me disais juste que Haïko signifie l’enfant des cendres… et vu son origine, ça me paraissait poétique…

Ah oui ! Comme le phénix qui renaît.

Exactement.

C’est très jolie… tu l’as revu ensuite cette sauveuse ?

Malheureusement pas… c’est dommage, j’aurais tellement voulu la remercier pour tout ce qu’elle a fait… surtout qu’elle ne s’est pas arrêtée à m’aider à mettre au monde, elle a protégé Haïko pendant un long moment d’un danger bien plus terrifiant.

Quoi ? Si petit et déjà menacé ?

Je fis une petite moue attristée.

Cet enfant portait sur son torse le sceau de la nation de mon agresseur…

Nouvelle stupéfaction dans l’audience.

Comme le dirigeant de Fuyu détestait tout ce qui était étranger, il était clair que s’il apprenait l’existence d’Haïko, il allait le mettre à mort, ainsi que ses complices, donc Mei et moi qui habitions la capitale…

Vous avez fui ??

Pas tout de suite… déjà parce-qu’être en caval avec un nouveau-né et une personne de plus de 70 ans c’était très compliqué… et surtout parce-que Mei a caché cette information à tout le monde pendant un long moment… même à moi…

Comment elle a fait ? Pourtant, sur le ventre, ça doit être visible…

La jeune femme qui m’a aidée à accoucher lui a donné ce soir un bracelet qui contenait un peu de sa puissance, mais aussi qui augmentait celle de Mei. Et avec cette nouvelle énergie, elle a usé du seul sort qu’elle connaissait : un sort d’illusion qui lui a permis d’effacer aux yeux de tous le sceau sur le corps d’Haïko. Seul elle pouvait le voir.

Elle te l’a avoué quand ?

Bien plus tard… avant cela, nous avons vécus plus ou moins normalement… hormis l’appel de guerre qu’il y a eu… Fuyu et une autre nation entraient clairement en guerre… J’ai refusé d’y participer au prix de très nombreux effort de courage. Heureusement, le sceau était devenu assez faible pour ne plus me soumettre à la volonté du divin. Mais en contrepartie, cette décision a attisé lourdement le mépris que la nation avait pour moi… c’était une nation très portée par le patriotisme et la prestance face aux autres, et avoir une telle personne dans ses rangs, elle ne pouvait pas se le permettre.

C’est devenu tendu là pour vous… vous avez fait quoi ?

Je t’avoue qu’au début, j’étais coincée. Ma nation me considérait comme un poids à éliminer, et dans mon imaginaire, les autres nations n’accepteraient jamais une appelée de Fuyu… je pensais n’avoir nulle part où aller. Mais au fil des rencontres que je faisais, j’ai petit à petit cultivé l’espoir qu’il existe chez les appelées des autres nations, des personnes comme moi qui ne fassent aucune différence de nation… alors j’ai pris mon courage à deux mains, et pour la deuxième fois de ma vie sur Kosaten, je suis sortie de Fuyu…

Je marquai une pause, me souvenant des sensations de réjouissance mais aussi d’appréhension qui m’avaient traversée quand  enfin j’ai franchi la frontière…

Et alors ? Tu as trouvé des personnes comme toi ?

Oui quelques-unes, et certaines étaient déjà puissantes. Mais je me suis décidée trop tard… l’engrenage de mon refus de guerre était enclenché…

Fuyu t’as menacée ??

Oui… au fil de mes rencontres, j’ai réalisé que peut-être une vie paisible était faisable en dehors de Fuyu. Mais alors que je ruminais cette décision en rentrant à Fuyu, songeant à embarquer mon fils et Mei avec, j’ai croisé la route d’un assassin envoyé de Fuyu… il venait pour moi…

Sérieux ??

Et c’est là que… j’ai développé Djadine…

De quoi ? c’est une technique propre à toi ?

Nan c’est bien plus complexe… l’assassin m’a laissé une dernière chance de rester en vie, en rejoignant docilement les rangs de Fuyu… mais je n’en avais aucune envie. Le problème, c’était que je ne savais plus quoi faire… je ne me sentais pas de taille à l’affronter, et si je mourrais, Haïko allait être éduqué à la façon de la nation, et je ne désirais pas le moins du monde. Alors m’est venu l’idée de quitter Kosaten en emportant mon fils avec moi…

Hein ?? Tu voulais te suicider et le tuer ?? T’es folle ??

Qu’est-ce que tu voulais que je fasse ?? m’emporté-je j’étais coincée !  Si tu crois que ça me faisais plaisir de pointer un kunaï vers lui !

On se calme !

Un silence fait retomber les ardeurs. Un soupir, et j’entends.

Ouais excuse-moi… tu devais être paniquée pour en arriver là…

J’étais totalement perdue… à tel point que cette solution me paraissait la plus libératrice… heureusement, au comble de la folie, une voix est apparue. Elle m’a rappelée des ténèbres où je sombrais et a pris le contrôle de mon corps.

Attends… c’est un être conscient ?? je comprends pas bien…

Et bien… je crains moi-même ne pas pouvoir expliquer davantage quelles sont ses origines… elle est juste apparue quand j’étais au plus bas, m’encourageant à tenir bon, et c’est elle qui est venu à bout de l’assassin. Elle s’est servi d’une technique propre à elle-même, que je ne connaissais pas… elle consistait en un étranglement par la pensée.

Attends tu vas un peu loin là Rumaki… tu veux dire que tu as un être qui vient d’on ne sait où, qui peut prendre possession de ton corps, et en plus lancer ses propres techniques ?

Je haussais les épaules.

C’est ainsi. Je ne vous demande pas de me croire vous savez… mais pourtant, je ne vous dis que la vérité… et elle vit encore en moi aujourd’hui…

Un blanc sceptique s’abat sur l’assemblée. Pourtant je sais ce que je dis… je sais ce que j’ai senti, ce que j’ai vu… j’aperçois d’ailleurs l’un des auditeurs me regarder avec un peu plus d’insistance.

Moi je te crois Rumaki, tout ton être respire la sincérité… continue s’il-te plaît, j’adore t’écouter.

Djadine ne l’a pas tué, elle savait très bien ce que je pensais de cet acte, et elle ne voulait pas me blesser plus. Elle s’est arrêté à un étouffement qui l’a mis dans le coma. Après cela, je me suis enfuie à la capitale et j’ai pris Mei avec moi pour m’enfuir. C’est d’ailleurs pendant cette cavale qu’elle m’a avoué pour le sceau d’Haïko.

Et comment t’as réagi ?

Dans le feu de l’action, j’étais un peu énervée qu’elle ne m’en ait pas parlé tout de suite, mais très vite je lui en ai été monstrueusement reconnaissante… encore une fois elle n’avait agi que pour moi quitte à s’épuiser… je lui dois beaucoup…

Et du coup, vous êtes allés où ?

Dans une autre nation appelée Seika. Mais le décompte avait sonné... j’étais condamnée, et je ne pouvais profiter de ce répit que pour mettre Haïko et Mei entre de bonnes mains. Ce que j’ai fait. J’ai revu un jeune garçon bien mature pour son âge que j’avais rencontré il y a peu longtemps auparavant. Il a accepté de les recueillir… et quelques jours plus tard je suis morte… tuée par cet assassin…

Et c’est ça qui t’a amené ici ?

Non heureusement, j’ai pu revoir mon petit bout de chou, car à Kosaten, quand un appelé meurt, il passe par un royaume des morts et peut au prix de douloureuses épreuves, revenir à la vie… alors j’ai décidé d’endurer ces épreuves pour revoir mon fils. À mon retour sur terre, j’étais inconsciente sur le sol, et j’ai été recueillie par une appelée de Seika qui m’a soutenue et soignée. Elle était adorable. Je ne l’ai vu qu’une fois malheureusement. Après cela, j’ai retrouvé le garçon à qui j’avais confié Haïko. Il m’a appris, qu’il ne l’avait plus. Il l’avait laissé à Nagato. Nous avons vécu encore ensemble tous les trois avec Mei quelques mois avant que celle-ci ne nous quitte, accablée par la vieillesse… c’était triste, mais elle méritait son repos. Pour la remercier je suis même aller jusqu’à retourner dans un endroit de Fuyu, pour lui rappeler de bons souvenirs, juste avant qu’elle ne rende son dernier souffle.

Oh c’est poétique…

Sur le moment j’étais très triste, mais je sais au moins qu’elle est partie l’esprit serein. C’était une très grande consolation.

Fuyu a su que tu avais ressucité ?

Je ne sais pas… et je ne le serai sans doute jamais, puisque peu après, j’ai vécu une apocalypse, et j’ai été transférée ici.

Quoi ? Tu veux dire que l’histoire est terminé ?

Euh… ben oui… je vous ai presque tout dit sur moi…

Comment ça presque ? Qu’est-ce que tu nous caches encore ?

J’émis un petit sourire.

Quelques petit détail que vous découvrirez peut-être en lisant mes prochaines aventures…

Les lire ??

Oh pardon… je viens de briser le 4e mur :3

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