Le feu rougeoie, les braises de la forge s'illuminent de couleurs chaudes et réconfortantes, hypnotisant le regard des badauds venus admirer l'effort humain de dompter le métal et l'acier. Alors que la nuit était tombée, l'atelier du forgeron s'activait toujours, sans doute un roulement entre l'équipe de jour et celle de nuit. Derrière les flammes, un visage s'éclaire au loin, rond, doux, subtile, celui de Rachel. Les hommes qui martèlent le précieux métal, travaillent pour le nouveau katana de la demoiselle. Même si l'échoppe contient nombre de sabres en tout genre et de lames similaires, la jeune fille avait envie de voir, on ne sait pas pourquoi, la création de son arme de A à Z. Elle avait finalement réussi à obtenir la somme nécessaire pour s'acheter de l'équipement pour l'aventure et avait persuadé le propriétaire de la forge à créer un nouveau sabre. Déjà en boutique, elle s'était achetée, auparavant, un arc finement taillé dans le bois, son carquois remplit de flèches et une tenue de voyage légèrement amélioré avec du cuir pour se protéger finement de quelques dommages.

Tout le long de la nuit, Rachel regardait ce bloc d'acier se transformer en une lame grossière, frapper, marteler, remise à des températures infernales pour encore subir les coups des forgerons et finalement atteindre sa forme finale d'une lame légèrement courbée à son sommet et plongée dans l'eau pour refroidir le métal. On dit souvent que la lame d'un guerrier est le reflet de sa propre âme, pour Rachel et les principes qu'on lui avait inculqué, c'était tout aussi vrai et elle pouvait sentir une certaine connexion envers sa future arme. Pourquoi ? On ne saurait pas le dire, mais la jeune fille était obnubilée par le côté spectaculaire de la chose, voir les étincelles jaillirent au contact du marteau et de l'enclume, le son que cela faisait, elle pouvait croire qu'une partie de son âme allait se greffer dedans. Cependant, un ouvrier alla la voir et lui dit que le métal avait besoin de rester au repos afin de continuer dessus au matin. Hochant la tête, la jeune fille partit se coucher à l'auberge.

Au petit matin, malgré la fatigue, Rachel se fit une toilette rapide avant de sortir en trombe à l'extérieur. Pressée d'observer la finition qui allait être faite à son katana, elle n'avait même pas pris la peine de manger quelque chose. Sur place, une partie de l'équipe s’affairait déjà à la création du fourreau tandis que l'autre polissait le métal et terminer de corriger les derniers petits défauts. Durant toute la journée, elle put visionner l'état final et l'assemblage globale de son arme avant que le patron vienne la voir pour lui remettre, enfin, sa commande.

Prenant le katana dans ses mains, elle testa le poids de cette dernière, assez lourde pour elle qui n'avait jamais eu l'occasion d'en tenir une vraie en main. Elle sortit ensuite la lame de son fourreau et observa son reflet sur l'acier polie, tel un miroir. Subjuguée par une telle merveille, elle toucha, caressa délicatement du bout des ongles l'objet de toutes ses convoitises et sentit un frisson lui parcourir le dos. Quelque chose s'était lié à elle, c'était une évidence, mais quoi ? Indirectement, c'était comme si Rachel s'était émancipée d'elle-même, devenant plus mature, ayant pris conscience de sa nouvelle vie et situation. Elle avait dans le regard cette détermination forte qui poussait les humains à aller de l'avant, quelle que soit la difficulté. Elle rengaina avant de murmurer tout en caressant la garde.

Elle remercia le patron et lui donna le reste de la somme convenue pour le katana. Elle rentra à l'auberge aussi contente que si elle avait eu la meilleure nouvelle de sa vie. C'était enfin un grand pas qu'elle venait de franchir, mais avant de partir à l'aventure, elle s'était décidée à s'entraîner avec son nouvel équipement, mais aussi à exploiter cette mystérieuse puissance cachée qu'elle avait usé lors de sa crise avec Keiji. Ce n'était donc pas terminé, loin de là.